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Que sais-tu à propos de la viande de requin, du calmar, du tilapia ? A une époque où les références aux écailles n’avaient vraiment plus aucun rapport avec le poisson, Young Dro, lui, développait une réelle obsession pour les fruits de mer. Mais pas n’importe lesquels, ceux avec des noms rigolos et à rallonge, les exotiques, avec des couleurs improbables et des goûts inconnus par les palais les plus rustres. Parce qu’à une époque où Atlanta célébrait d’abord ringtones et motivational speakers, Young Dro est resté obsédé par le son de ses syllabes, par les techniques servant à les étirer et les faire rimer unilatéralement à 360° Celsius.

Jumanji, Sponge Bob, Piggy la cochonne, les ponchos, la paëlla, les oreos, le Monopoly, la Macarena et les sauces japonaises ont en commun leurs voyelles internes, terrain de jeu favori de Dro. Son truc, c’est de colorier des images avec le son de ses mots. Son univers est une mosaïque arc-en-ciel, une plongée dans le système nerveux d’un synesthète sans qu’un seul nom de couleur ne soit jamais prononcé. Young Dro trempe des crevettes Ralph Lauren dans le jus de kiwi d’une femme fontaine pour faire apparaitre les contours de voitures de luxe. Un magicien, qui se déguise en aristocrate blanc pour faire rimer « polo » avec « turbot » ou en sud-américain quand il est plus inspiré par « mucho » et « mexicano ».

Evidemment, le grand patron de ce parlé, c’est E-40 et son Oldmobile Cutlass cuirasse cocaïne, capote cookie et intérieur moutarde-mayonnaise. Mais on ne peut s’empêcher de penser que si ce petit trick d’écriture s’est répandu à Atlanta c’est aussi grâce à Young Dro. Sa force, c’est d’avoir cette maitrise de l’image et de la référence farfelue, tout en ayant un rap « classic » avec un flow technique et hyper précis. Sur le papier, le dandy de Bankhead aurait pu être l’ATLien ultime, mais son style hybride n’a pas complètement réussi à réunir l’amateur de performance technique et celui de chaussures en salamandre. Young Dro ne sera jamais une superstar, mais il reste un héros local et l’auteur en 2006 d’un album qui est devenu culte au fil des ans.

Entre roulements de cuivres et d’orgues d’églises, rap de rappeur, images de dessins animés, musiques de carnavals, qu’ils soient de Bogota ou de New Orleans, mélanges de blagues, de romantismes, de délires swag-rap et de white boy swag, la carrière de Young Dro est un grand gumbo de fun, à peu près résumé dans cette compilation :

HYDROPOLOTILAPIA

illustration : Bobby Dollar
Part.1 ; Part.2 ; Part.3

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