category: Blog
tags:

La Bay Area, région nord de la Californie, possède une scène particulièrement dynamique. L’année 2013 n’a pas fait défaut. Les points de vue spécifiés ci-dessous sont purement personnels et peuvent paraître arbitraires. Le rap que j’écoute se résume assez simplement : de la musique de gangster déprimé ou de gros thug. Si ce référentiel ne vous convient pas, passez votre chemin.

Mac Reese est de Fairfeild, une ville proche de Vallejo. On pourrait dire qu’il fait de la Mob Music. Il a sorti en début d’année Bac 2da 90s, un très bon album. Ces quelques morceaux devraient suffire à vous convaincre : Mafia Music ; 25 Wita L ; Fa The Camera.
A-Wax est de Pittsburg. Sa musique est relativement différente du reste de la Bay. Il a sorti Jesus Malverde en référence au « patron saint of narco kingpins ». C’est un bon album. Quelques extraits : Apartheid ; Gun Range ; On Sight. Il a également sorti InnerState Trafficking, un album en commun avec un membre de Brick Squad West Coast, YG Hootie. Seul le rap de Waxfase m’intéressait et je ne me suis pas vraiment attardé dessus. Le meilleur morceau est probablement celui-ci sorti un ou deux ans plus tôt : Aliens.

Shady Nate est d’Oakland. Il fait partie de l’équipe Livewire et en est indubitablement le meilleur. Il a sorti 3 projets. Il essaie de mettre ses jeunes en avant avec la Shady Nation sur les 2 volumes de Nation of Domination. Le volume 2 m’a semblé légèrement plus intéressant. Tout seul, il sort le deuxième volume de Mobb Marley. Rien à voir avec le premier, celui-ci est un bon album. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait de mieux cette année. Et même si on n’est pas au niveau de Still Based On a True Story, ça reste très bien. Quelques extraits : Aviation ; Fa Ma Niggaz (morceau datant de l’été 2012).
Pour continuer sur Livewire, J.Stalin semble être en fin de course. Son double album avec DJ Fresh, Miracle & Nightmare On 10th Street, n’était pas très fameux. La compilation qu’il a sorti plus ou moins au même moment Down To The Wire est nettement mieux.
Stevie Joe a sorti un album entièrement produit par les Mekanix. Malheureusement je n’ai toujours pas le courage d’écouter « STEVIE » plus de 20 min d’affilée. Je ne dis pas pour autant que l’album est mauvais, il est simplement hors de mon champ cognitif.
Lil Blood a sorti une nouvelle mixtape, Methadone Vol. 2, Still On Dope. De la bonne musique de thug porté sur le sirop, les benzos et la poudre. Extraits : Actavis & Zan Bars ; Lil Boosie ou le très bon Cake Mix qui est assez différent du reste du CD. Si vous écoutezMethadone vol 2 vous remarquerez sans doute que Lil Blood prend certaine liberté dans la construction de ses disques.

NhT Boyz est un groupe de Oakland produisant un rap de grande qualité. NhT signifie «No home training» et le groupe est composé de trois cousins, Chip$ Black aka Chipa$$, Nikatine da King et Knowledge aka Knawley Fit Game. Cette année, ils ont d’abord sorti un album intitulé YP vs Rizzy. Sur une vingtaine de morceaux, les rappeurs alternent sur des productions de leurs deux compositeurs attitrés. L’écoute de ce projet est vivement recommandée. On peut y retrouver les morceaux suivant : YP 196 YangOlogy ; Toast. Dans le courant de l’été Chip$ Black et Nikatine ont chacun sorti leur premier projet solo, Original Yangster et Wet Up. Yang est un terme de leur argot qu’ils utilisent régulièrement pour se caractériser, ils vivent dans le « Yangland » (nom de leur avant-dernier disque) et tout porte à croire que le « yanging » correspond à leur façon d’appréhender la vie alors qu’ils arpentent la ville des chênes. Un truc de rappeur en quelque sorte. Original Yangster est également un très bon CD comme en témoigne les morceaux suivants : Made Nigga ; Uh Huh/Bars Up (le premier morceau est extrait de Wet Up) ; Zooted . Un album du groupe a été annoncé pour 2014.

HD du Bearfaced Gang est également localisé à Oakland, de la partie nord, surnommée « Ice City ». Il a sorti cette année 3 projets. Le premier, No Days Off, est sans doute le plus réussi. En voici quelques clips : H1N1 ; No Pretendo. Le suivant, Federal Thougts (premier volet d’une trilogie qui devrait être développée en 2014), bien que moins intéressant, contient quelques merveilles comme Bury The Ratchet ; Oppresion, ou encore All You See Is The Struggle, et peu m’importe qu’il s’agisse d’une face B. Le dernier,Unchained, Freedom Earned African Descent, m’a laissé jusque là assez indifférent. On notera que le mixage est relativement inférieur à ceux des deux précédents. Comme à son habitude, HD en a également profité pour clipper des morceaux de l’année passée comme Take Time To Think ou Destiny extraits d’Extortion Music 4.

Joe Blow est également d’Oakland. Il est assez proche du Jacka, de son label The Artist Record dont il fait parti, et plus généralement de l’ensemble des Mob Figgaz avec qui il collabore régulièrement. On le retrouve aussi aux côtés de rappeurs du Midwest fortement influencés par la bay comme F.A. the Fonk Artist du Missouri ou Young Bossi de l’Ohio. Joe Blow a été particulièrement productif cette année. Il a sorti 4 albums dont Check a real n!gga out, son second album « officiel » si on peut parler ainsi, un double album avec Young Bossi (dont la première moitié avait déjà leaké l’année passée) et un projet avec Jacka et LIQ (qui reste pour moi un parfait inconnu). Il serait délicat de résumer un tel volume en quelques mots. Check a real n!gga out est le plus abouti et est produit intégralement par Pakslap et Bandit. Been GrindingBlow et True Story sont légèrement plus hasardeux et n’ont certes pas le même degré de finition que C.A.R.N.O. mais restent très intéressants. On notera qu’ils restent tout de même un peu trop long (plus de 20 morceaux à chaque fois) et auraient pu être amputés d’un bon tiers pour en faire de très bons albums. Il en va de même pour l’album avec Young Bossi, Fishscale Blow, qui aurait pu être réduit à un simple album. Joe Blow sort une quantité relativement impressionnante de clips qu’on pourra retrouver sur sa chaine youtube. En voici quelques uns extraits des divers projets sortis cette année : Street Life ; Rich Nigga Mobbin ; Real Mob ; How Many Times. Pour l’année prochaine, Blow a prévu de sortir You should be paying me too, suite de son premier album qui sera entièrement produit par Dosia did the beat.

Young Lox est un jeune rappeur d’Oakland qui a sorti plusieurs projets en début d’année. On retiendra surtout son album avec Dame (Dash) on the slap (qui a produit entièrement Kokaine Ballads Frum My S550 de Messy Marv), Writing Slapz et dans une moindre mesure sa mixtape Im so fresh. Il a également sorti Back 2 the Baysic’s avec FA the Fonk Artist de KC, Missouri. De qualité inégale, on peut tout de même y retrouver de très bons morceaux.
Young Wappo a sorti Not Guilty, une très bonne mixtape dont PBS avait déjà parlée. Il est vivement recommandé de l’écouter (ex: Ties & Affiliations). Il est prévu que Young Wappo sorte un nouveau projet début 2014.

PBS TOP 5 2013 BAY AREA RAP:

1. Joe Blow, Check a real n!gga out tho 2. A-Wax, Jesus Malverde 3. HD, No Days Off 4. E-40, Welcome To The Soil  5. Young Lox, Writing Slapz 

Texte : Big Tuego / Illustrations : Hector de la Vallée

category: Blog
tags:

It’s not his most essential, and far from his most representative, but my favorite Chief Keef song remains 2012’s “Save That Shit,” from his career-launching (on a national scale, at least) Back From The Dead tape. In stark contrast to the rest of the tape’s nihilistic lurch, it’s buoyant and sparkly, closer to peak-Soulja-Boy era ringtone rap than anything that qualified as “drill”; even lyrically, though Keef scoffs at the idea of love, it’s one of those moments where a specific sort of naivety, simultaneously precious and tragic, unintentionally reveals itself. Mostly it’s just fucking fun, happy music.

Fast forward to 2013: the drill sound that had defined the city was splintering and warping exponentially. Certainly the deadpan death-march of the previous years remained a force (done best by P Rico, SD, and Lil Durk), but mostly shit got weirder: Keef gravitated away from the English language entirely, Sasha flirted with EDM, Louie dabbled in pretty much every genre you can think of, and the most heralded Chicago tape of the year was made by a kid about as intimidating as a box of Lunchables who just collaborated with Justin Bieber.

And most thrillingly, to me at least, there was the gradual, grassroots takeover of bop, the regional dance trend turned rap trend in diametric opposition to what people had come to expect from the city. Grandfathered by DJ Nate, popularized by Lil Kemo and DLow, spearheaded by Lil Chris, Breezy Montana and Sicko Mobb, and master-crafted by Leekeleek and Cicero On Da Beat, bop grew from a nominal west side curiosity to a phenomenon by mid-summer. Driving through the west side in September, I saw kids in school uniforms bopping on street corners. There’s a long-standing history of the sounds of the south influencing Chicago musicians—from its urbanization of classic southern blues in the first half of the 20th century as a result of the Great Migration, to drill first-wavers’ stark interpretation of Lex Luger’s bombastic trap aesthetics. Like drill, bop music is indebted to Atlanta, but it’s the Atlanta dominated by Future and his contemporaries, gargling their feelings like mouthwash through egregious autotune and bouncy, emotionally evocative beats that twinkle like the studs on Nayvadius’ leather sweatsuits. But it’s filtered through a distinctly Chicago lens—a touch of drill’s gun-slinging machismo, ghosts of Warehouse-era house’s physicality, more than a hint (especially with Sicko Mobb) of juke and footwork’s trippy freneticism.

On paper it’s no more complex than danceable, feel-good swag rap, a bit fluffy in content perhaps, stimulation for the body and soul moreso than the mind. But when examined relative to the ideals and aesthetics of drill, not to mention the grim realities of Chicago’s south and west sides, its feel-good simplicity becomes something more: a poignant, aggressively optimistic form of escapism, an oasis where everything’s a party. A happy place.

Meaghan’s BEST OF 2013 BOP MUSIC:

BEST NEW ARTIST: Sicko Mobb PRODUCER OF THE YEAR: Leekeleek BEST SINGLES: Sicko Mobb f. Lil Durk, « Maserati » ; Lil Chris f. Breezy Montana, « Bop Like Me » ; Breezy Montana, « Havin Shit » ; King Louie f. Lil Durk, « Thotty Things » ; Sicko Mobb, « Hoes Be Goin » BEST MIXTAPES: Lil Chris, Money Talks ; Breezy Montana, Rise 2 Fame ; Matti Baybee, Young Legend ; DJ Nate, Dope N Music

PBS TOP 5 2013 CHICAGO RAP:

1. TREE, Sunday School II ; 2. Lil Durk, Signed To The Streets ; 3. ZMONEY, Rich B4 Rap ; 4. Giftz, Position Of Power ; 5. King Louie, Drilluminati II 

Texte : Meaghan Garvey / Illustration : Lomé Iench

category: Blog
tags: ,

Pris séparément, les titres de Cold Turkey sont des perles de mélodies éthérées, sauvagement ravagées par une boulimie addictive de basses. Lil Lody par exemple, ex-copycat de Lex Luger, est allé muscler son jeu dans les nuages de Clams Casino et tient désormais l’écrin parfait au désarroi de Starlito. A chaque fois, c’est une démonstration du meilleure de la trap music, parce qu’incarnée par un rappeur qui n’hésite pas à se mettre tout entier dans ses chansons, avec une honnêteté parfois presque brutale, poussée jusqu’à cette frontière où l’immensément personnel devient universel. D’où ce sentiment de sans cesse avancer en terrain connu, d’être face à un reflet familier : Aussi loin que l’on puisse être du quotidien du rappeur, il est toujours possible de se retrouver dans ses récits de trahisons, d’amour, de paranoïa ou de fuites impossibles. Starlito ne s’embarrasse pas de trop de gimmicks, ni de démonstrations techniques ou de punchlines, seule son écriture sert de réceptacle aux émotions dont il semble vouloir se libérer, à la manière de la « pensine » des magiciens de J.K. Rowling. Ses textes denses ont toujours permis à ses chansons d’avoir une « replay value » infinie, d’y découvrir à chaque fois de nouveaux détails ou sens, et ceux de Cold Turkey ne font pas exception.
Mais pris dans son ensemble, l’album dessine quelque chose de supérieur à la somme de ses parties. Avant Step Brothers 2 et son shakespearien Caesar & Brutus, Starlito a laissé entrevoir ses talents de dramaturge sur ce Cold Turkey. Cette fois-ci, peut-être malgré lui, c’est d’avantage aux machines infernales grecques que le rappeur renvoie.
Parce que l’entame du disque est une introduction qui ressemble à un prologue, expliquant le thème de l’histoire, les chansons qui suivent deviennent soudainement un enchainement d’actes et de scènes, et chaque invité un personnage assujéti au propos de Starlito. « Cold turkey » est une expression américaine, c’est quitter une mauvaise habitude sans tergiverser, d’un coup, et ici ce sont les conneries de rappeurs et de la rue que Lito veut abandonner « cold turkey ». Quitter la vie de gangster, en somme. Une fois cette idée placée dans la tête de l’auditeur, les thèmes classiques de la trap music germent différemment : quand Starlito parle de ses envies d’argent et de flingues, se dessine l’impression d’assister à des rechutes, et les couplets sans vergogne des invités deviennent les émanations d’un environnement qui ne cesse de ramener Starlito là où il ne voudrait plus être. Plus le disque avance, plus on se demande si tous ses protagonistes ne sont pas simplement prisonniers de leur univers, et s’il est finalement possible de faire « cold turkey ».
L’idée est parfaitement résumé dans Luca Brasi Speaks, titre sur lequel Starlito est symboliquement absent, comme pour marquer d’avantage son rôle de metteur en scène. Seul maitre à bord, Kevin Gates y déboule avec la voix plus grave et éraillée que jamais, chargé d’une haine bouillonnante et contenue. Ce Luca Brasi pourrait être le fantôme des Noël passés ou futurs de Starlito. Représente t’il la vie que le héros peut réussir à fuir, ou ce qu’il deviendra après avoir renoncé à se libérer de ses démons, pour de bons brûlé par sa condition et résigné à vivre « la vie d’un général » ? C’est à l’auditeur de décider si la conclusion de Cold Turkey est optimiste ou pessimiste.

Avec ce disque, le suivant Fried Turkey, et la mixtape Funerals & Court Date sortie en toute fin d’année dernière, Starlito est entré pour de bon dans la cours des grands, des immenses. Brad Jordan genre de merde. Cette année, s’il devait n’en rester qu’un, sans hésiter un seul instant, c’est lui.

10 autres albums de 2013 : Shy Glizzy, Law 2 ; KA, The Night’s Gambit ; Young Scooter, Street Lottery ; Young Thug, 1017 Thug ; Kevin Gates, The Luca Brasi Story ; Tree, Sunday School II ; Foxx, Cold Blooded ; Ampichino, Da Krazies 2 ; Gunplay,Acquitted ; Lil Durk, Signed To The Streets 

Texte : PBS / Illustration : Hector de la Vallée